vendredi 13 juillet 2007


Fort d'Issy

Quand les femmes de gendarme se rebiffent Olivier Bureau

jeudi 12 juillet 2007 | Le Parisien

La colère gronde derrière les murs du fort d'Issy-les-Moulineaux. Ce matin, Me Renaud Rialland, l'avocat des femmes des militaires de la Musique de la gendarmerie mobile doit déposer une requête auprès du tribunal administratif de Melun (Seine-et-Marne). La deuxième en dix jours (lire ci-dessous), dont l'objectif reste le même : obtenir l'annulation du déménagement des gendarmes-musiciens d'Issy-les-Moulineaux à Maisons-Alfort (Val-de-Marne) prévu pour laisser la place à la direction générale de la gendarmerie regroupée à Issy.

Une situation «rarissime», souligne Jacques Bessy, vice-président de l'Adefdromil, l'Association de défense des droits des militaires qui prédit : « Au fort d'Issy, on se dirige vers un véritable bras de fer. »

Car, si leurs époux sont tenus au devoir de réserve, les femmes des sous-officiers de la Musique ont décidé, elles, de sortir de la leur. Pas question de déménager. Toutes ont globalement la même histoire. Basés au Plessis-Robinson ou à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), les musiciens ont été regroupés à Issy-les-Moulineaux en 1999. Nouvelle caserne, nouveaux appartements, grands et confortables... «Quand nous sommes arrivées, nous avons toutes changé de vie, de travail ; on a dû scolariser nos enfants dans le secteur. Aujourd'hui, on se fait piquer nos logements pour y loger les officiers de la direction générale, fulmine Hélène. Ceux de Maisons-Alfort ne sont pas assez bien pour eux. Pour nous en revanche...» Ses consoeurs acquiescent en silence.

«Les appartements de Maisons-Alfort sont pourris : on ne va quand même pas les donner à des officiers», ironise Bénédicte. Et d'exhiber des photos accablantes des futurs logements : saleté, trous dans les murs, fissures au niveau des balcons, humidité, plomberie ou électricité loin d'être aux normes... «Ils ont osé nous faire visiter ça !» s'insurge Martine. «Faute de crédit, quand nous déménageons, c'est à nous de faire les travaux. En plus d'être gendarme et musicien, il faut être bricoleur», grommelle un militaire. Les chantiers de réfection de ces logements annoncés par la direction ? La réponse fuse : «Une blague !»

« Il est temps de faire bouger cette institution »

Un profond sentiment d'injustice emplit peu à peu la pièce où une demi-douzaine d'épouses se sont réunies. «A la base, la vie en caserne a quelques contraintes. C'est un milieu clos, confiné mais on accepte», résume Pascale. Mais «ce qui se passe en ce moment va trop loin. Il est temps de faire bouger cette institution aussi vieille que Napoléon, tonne Hélène. En haut lieu, certains s'accrochent à leurs privilèges. Nous, on se rebiffe, alors forcément on est cataloguées... Ils ont menacé de ne pas accorder les permissions, voire de dissoudre la Musique. Le mépris des officiers envers la troupe est total. C'est toujours le petit qui paye.»

«Les gendarmes n'ont pas droit à la parole. On applique la hiérarchie, on joue sur la discipline de la manière la plus bête», renchérit Pascale. La fronde prend soudain des échos de lutte des classes. La rupture avec la soumission au silence de la Grande Muette se fait tranchante. «On en a marre de subir, précise Pascale. Nous irons juqu'au bout. On espère que notre réaction donnera un coup de pouce à ceux, les militaires et leurs femmes, qui n'osent pas prendre la parole, que notre mobilisation fera boule de neige. De toute façon, nous, ici, on ira jusqu'au bout.» Mais pas à Maisons-Alfort.

(LP/O.BU ET O.D.)  ISSY-LES-MOULINEAUX, FORT DE LA GENDARMERIE. Déménager dans le Val-de-Marne dans des logements jugés quasi insalubres ? Hors de question pour les femmes des gendarmes mobiles de la Musique (photo de gauche).

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